Tous les matins, mon beau-père se faisait un smoothie. Pas avec des fruits, des légumes pour que ce soit d’une belle couleur! Non : des œufs, du beurres d’arachides, du gruau, du poulet!... et toujours un petit peu de poudre saupoudrée sur le tout. Le dernier ingrédient et non le moindre! Il dépensait une fortune pour des barils de poudre qui faisaient gonfler ses bras et rapetisser son cerveau…
Cela a commencé d’abord par une simple curiosité : si je mélangeais du sel à sa poudre de protéines, s’en rendrait-il compte? Non? Essayons alors avec de la farine… Puis, du bicarbonade de soude… Ensuite, de la poudre pour bébé… Enfin, de la poudre à récurer… Sans trop réfléchir, mais poussé par une haine de plus en plus forte de lui faire payer le chagrin qu’il causait à ma mère, je peaufinais ma recette de pouding à l’arsenic…
J’étais rendu à essayer du poison à fourmi lorsque mon beau-père m’a pris la main dans le sac… Je n’ai étrangement pas senti de frayeur lorsque j’ai vu ses yeux injectés de sang, sa mâchoire crispée, ses poings serrés s’approcher dangereusement de moi. Je n’ai étrangement pas senti de douleur, ou si peu, lorsqu’il s’est mis à me battre comme dans l’ancien temps… ou comme son punching bag. Je savais que lorsque Maman rentrerait à la maison et me verrait dans cet état-là, elle aurait la meilleure des excuses pour quitter cet imbécile. Ainsi, en l’obligeant à me protéger de ce batteur d’enfant, je la vengeais, elle, du mauvais traitement de son amant.